LA GESTE DU TABAC
Le fumeur est économe en gestes. Les
volutes de fumée parlent sans qu’il lui soit nécessaire d’en rajouter. Michel
Audiard écrivait, « un gentleman est
celui qui peut décrire Sophia Lauren sans faire de gestes ». Ainsi va
le fumeur, celui qui peut décrire une belle, lentement, avec force volutes
et ronds de fumée.
Le geste du fumeur a la sobriété de l’urgence et/ou du plaisir.
C’est un geste simple qui
consiste principalement à lever le coude pour, dans un mouvement de l’avant bras, permettre l’approche de la
cigarette portée aux lèvres. Il ne faut pas être mesquin dans l’amplitude du
geste, mais nécessité oblige, surtout quand on a le taulier ou le singe sur le
dos, alors le geste se fait plus furtif, plus sournois. Il y en a qui gardent
la clope aux lèvres.
Il paraîtrait que les rituels du fumeur, aller au tabac, ouvrir son
paquet, sortir une clope, l’allumer, tirer dessus, faire tomber la cendre,
recommencer, constituent une difficulté de plus à surmonter quand par malheur
le fumeur veut arrêter de fumer. Il serait parait-il presque plus difficile de
supporter le manque du geste que le manque du tabac.
La vie est heureusement bien faite pour qu’il n’y ait finalement aucune
difficulté à reprendre la cigarette. Une première, et les autres cigarettes suivront,
sans aucun problème, croyez-moi bien !
Humphrey
Bogart, Marlène Dietrich, Jean Gabin,
Jacques Prévert, Lauren Bacall, pour ne prendre que ceux et celles qui nous
viennent en tête, ont souvent arboré une tige plantée entre les lèvres. Chacun
avec son « air » son geste, sa pose.
Luke Lucky arrêta de fumer pour des
raisons de moralité concernant les mineurs (les enfants) en 1983-1984 : il
avait la gueule de l’emploi, il roulait d’une seule main, la blague à tabac
dans la bouche (la blague à la bouche), l’autre main prête à tirer, joyeux &
fringant cow-boy ; aujourd’hui il ressemble à une chèvre avec son brin d’herbe.
Triste, très triste.
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